Le déclenchement de la guerre et le front des Vosges

Kurt Hochstuhl

 
37 französische Gefangene, 10.11.1917 (Quelle: Generallandesarchiv 456 F 65, Nr. 9 Foto 3)
Un champ de bataille extrême: la tranchée principale allemande recouverte de neige sur le Kleine Belchen (1915/16) (Source: Landesarchiv BW, GLAK 456 F 105, Nr. 164 Foto 27 )

Si l’attentat perpétré à Sarajevo le 28 juin 1914 contre le prince héritier François Ferdinand d’Autriche fut certes perçu comme un évènement sensationnel par l’opinion publique européenne, il ne semblait toutefois pas d’emblée constituer une source d’inquiétude. Mais lorsque la Russie ordonna le 30 juillet 1914 la mobilisation générale à la suite de la déclaration de guerre de l’Autriche à la Serbie, la logique d’obligation réciproque des alliances s’enclencha, à l’encontre des prévisions des parties prenantes. Aux Empires centraux, l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie, faisaient face les forces de l’Entente, constituées de la France, de la Russie et du Royaume-Uni, en tant qu’adversaires principaux. En raison de l’inextricabilité de la situation, chacune des parties prenantes avait beau jeu de se positionner comme « offensée ». L’immense enthousiasme des masses à l’éventualité de la guerre n’était toutefois pas aussi manifeste et généralisé qu’on le représente généralement. Partout prévalaient également la peur et l’inquiétude, surtout chez les gens simples, et notamment près des frontières le long du Rhin supérieur. Et pourtant, même le mouvement internationalisé des ouvriers se laissa convaincre par les intérêts nationaux de la guerre.

 

Le plan Schlieffen, fameuse stratégie allemande visant à écraser rapidement la France, avait prévu de faire de l’Alsace et de grandes parties de la Lorraine un glacis (zone démilitarisée) sur lequel une aile gauche volontairement affaiblie devait occuper l’ennemi dans sa tentative de pénétration, tandis que les forces allemandes principales contourneraient l’armée française à partir de l’aile droite et perceraient jusqu’à Paris. Karlsruhe, Strasbourg et Fribourg-en-Brisgau étaient des carrefours importants dans la répartition technique des soldats se rendant vers le front Ouest.

 

Dès la première semaine du conflit, le 7e corps d’armée français de Belfort franchit la frontière à Altkirch et réussit par deux fois à avancer jusqu’à Mulhouse, mais fut repoussé à chaque fois par des troupes allemandes ; le front s’immobilisa dans le Sundgau. L’attaque du Haut-Rhin n’avait pas tant d’importance stratégique que politique : la France cherchait à marquer sa volonté de libérer ses provinces perdues. Et l’armée française put en effet s’établir dans le sud des Vosges et placer une partie du territoire impérial, avec son chef-lieu Thann, sous administration française. Au cours des années qui suivirent, de violents combats enflammèrent les Hautes-Vosges pour le contrôle stratégiquement important des sommets du Vieil-Armand et du Linge, combats qui tel un condensé reflétaient bien le caractère de ce conflit mondial avec ses guerres de tranchées et de positions, ses batailles de matériel et ses nombreuses pertes humaines pour le gain dérisoire de territoires la plupart du temps insignifiants et très vite reperdus. Le terrain extrêmement difficile conditionnait aussi, dans les deux camps, l’intervention d’unités d’élite telles que les troupes de montagne et les troupes d’assaut. La population civile alsacienne fut ainsi souvent prise dans le feu croisé entre les fronts. Les zones de combats occasionnaient des destructions massives. Nulle part ailleurs, hormis en Prusse orientale, le front et l’arrière du front n’étaient aussi proches l’un de l’autre, côté allemand, ni la population aussi directement confrontée à la terreur comme à l’absurdité de la guerre, que de part et d’autre du Rhin.

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